La réforme du droit pénal sexuel est entrée en vigueur le 1er juin 2022. Elle est portée par la loi du 21 mars 2022 modifiant le Code pénal en ce qui concerne le droit pénal sexuel
Cette réforme introduit explicitement la notion de consentement en le définissant.
Ainsi, « le consentement suppose que celui-ci a été donné librement. Ceci est apprécié au regard des circonstances de l’affaire. Le consentement ne peut pas être déduit de la simple absence de résistance de la victime. Le consentement peut être retiré à tout moment avant ou pendant l’acte à caractère sexuel. Il n’y a pas de consentement lorsque l’acte à caractère sexuel a été commis en profitant de la situation de vulnérabilité de la victime due notamment à un état de peur, à l’influence de l’alcool, de stupéfiants, de substances psychotropes ou de toute autre substance ayant un effet similaire, à une maladie ou à une situation de handicap, altérant le libre arbitre. En tout état de cause, il n’y a pas de consentement si l’acte à caractère sexuel résulte d’une menace, de violences physiques ou psychologiques, d’une contrainte, d’une surprise, d’une ruse ou de tout autre comportement punissable. En tout état de cause, il n’y a pas de consentement lorsque l’acte à caractère sexuel a été commis au préjudice d’une victime inconsciente ou endormie » (article 417/5)
La réforme fait expressément mention de situations dans lesquelles le mineur d’âge n’est jamais réputé avoir la possibilité d’exprimer librement son consentement, notamment dans le cas d’inceste : « Un mineur n’est jamais réputé avoir la possibilité d’exprimer librement son consentement si :
1° l’auteur est un parent ou un allié en ligne directe ascendante, ou un adoptant, ou un parent ou un allié en ligne collatérale jusqu’au troisième degré, ou toute autre personne qui occupe une position similaire au sein de la famille, ou toute personne cohabitant habituellement ou occasionnellement avec le mineur et qui a autorité sur lui, ou si
2° l’acte a été rendu possible en raison de l’utilisation, dans le chef de l’auteur, d’une position reconnue de confiance, d’autorité ou d’influence sur le mineur, ou si
3° l’acte est considéré comme un acte de débauche ou un acte de prostitution » (article 417/6).
La majorité sexuelle
En Belgique, la code pénal (article 417/6) fixe la majorité sexuelle à 16 ans. Cela signifie qu’avant cet âge, il est considéré que le mineur ne peut consentir à un rapport sexuel. dès lors, à partir de cet âge-là, un mineur peut entretenir une relation sexuelle hétérosexuelle ou homosexuelle sans que cela ne soit punissable.
Il s’agit là d’un changement important découlant de la réforme du code pénal en ce qui concerne les relations sexuelles des mineurs de plus de 14 ans et de moins de 16 ans. Auparavant, une personne ayant des relations sexuelles avec un mineur consentant entre 14 et 16 ans n’était pas passible d’une condamnation pour viol, mais d’une condamnation pour attentat à la pudeur. Désormais, il y aura viol chaque fois que des relations sexuelles ont lieu avec un mineur de moins de 16 ans, même âgé de plus de 14 ans.
Toutefois, la loi prévoit quelques exceptions dans l’objectif de rencontrer un équilibre entre autodétermination sexuelle et protection des mineurs.
Premièrement, « un mineur qui a atteint l’âge de quatorze ans accomplis mais pas l’âge de seize ans accomplis, peut consentir librement si la différence d’âge avec l’autre personne n’est pas supérieure à trois ans. Il n’y pas d’infraction entre mineurs ayant atteint l’âge de quatorze ans accomplis qui agissent avec consentement mutuel lorsque la différence d’âge entre ceux-ci est supérieure à trois ans » (article 417/6). Donc une personne de quatorze ans pourrait avoir une relation sexuelle avec une personne de 17 ans, mais pas plus. Sinon, ce sera considéré, aux yeux de la loi, comme étant un viol.
Deuxièmement, si une personne majeure entretient un rapport sexuel avec un mineur cela sera considéré comme un viol à moins que l’écart entre les deux personnes soient égal ou inférieur à 3 ans. Par exemple, une personne de 18 ans pourrait avoir une relation sexuelle avec un mineur de 15 ans, mais pas moins.
Attention, la majorité civile est toutefois bien fixée à 18 ans. Cela signifie qu’entre 16 et 18 ans, un mineur peut avoir des relations sexuelles mais il est toujours mineur civilement et donc soumis à l’autorité parentale. Celle-ci permet notamment aux parents d’avoir, au moins théoriquement, un contrôle sur les relations de leur enfant.
Les actes à caractère sexuels non consentis
A. L’atteinte à l’intégrité sexuelle
Article 417/7 : « L’atteinte à l’intégrité sexuelle consiste à accomplir un acte à caractère sexuel sur une personne qui n’y consent pas, avec ou sans l’aide d’un tiers qui n’y consent pas, ou à faire exécuter un acte à caractère sexuel par une personne qui n’y consent pas.
Est assimilé à l’atteinte à l’intégrité sexuelle le fait de faire assister une personne qui n’y consent pas à des actes à caractère sexuel ou à des abus sexuels, même sans qu’elle doive y participer. »
B. Le voyeurisme
Art. 417/8 : « Le voyeurisme consiste à observer ou faire observer une personne ou réaliser ou faire réaliser un enregistrement visuel ou audio de celle-ci,
– directement ou par un moyen technique ou autre ;
– sans le consentement de cette personne ou à son insu ;
– alors que cette personne est dénudée ou se livre à une activité sexuelle explicite ; et
– alors que cette personne se trouve dans des circonstances où elle peut raisonnablement considérer qu’elle est à l’abri des regards indésirables.
Par personne dénudée, on entend la personne qui, sans son consentement ou à son insu, montre une partie de son corps, laquelle, en raison de son intégrité sexuelle, aurait été gardée cachée si cette personne avait su qu’elle était observée ou faisait l’objet d’un enregistrement visuel ou audio. »
C. La diffusion non consentie de contenus à caractère sexuel
Art. 417/9 : « La diffusion non consentie de contenus à caractère sexuel consiste à montrer, rendre accessible ou diffuser du contenu visuel ou audio d’une personne dénudée ou d’une personne qui se livre à une activité sexuelle explicite sans son accord ou à son insu, même si cette personne a consenti à leur réalisation. »
Dans le langage courant, on parle de « revenge porn ».
D. Le viol
L’art. 417/11 du nouveau code pénal définit le viol en ces termes : « On entend par viol tout acte qui consiste en ou se compose d’une pénétration sexuelle de quelque nature et par quelque moyen que ce soit, commis sur une personne ou avec l’aide d’une personne qui n’y consent pas. Cette infraction est punie de la réclusion de dix ans à quinze ans ».
E. Sanctions
Les actes à caractère sexuel non consentis commis au préjudice d’un mineur de moins de seize ans accomplis sont punis comme suit :
– l’atteinte à l’intégrité sexuelle est punie de la réclusion de quinze ans à vingt ans ;
– le voyeurisme est puni de la réclusion de dix ans à quinze ans ;
– la diffusion non consentie de contenus à caractère sexuel est punie de la réclusion de quinze ans à vingt ans ;
– la diffusion non consentie avec une intention méchante ou dans un but lucratif de contenus à caractère sexuel est punie de la réclusion de quinze ans à vingt ans et d’une amende de deux cents euros à dix mille euros ;
– le viol est puni de la réclusion de vingt ans à trente ans.
Les actes à caractère sexuel non consentis commis au préjudice d’un mineur de plus de seize ans accomplis sont punis comme suit :
– l’atteinte à l’intégrité sexuelle est punie de la réclusion de dix ans à quinze ans ;
– le voyeurisme est puni de la réclusion de cinq ans à dix ans ;
– la diffusion non consentie de contenus à caractère sexuel est punie de la réclusion de dix ans à quinze ans ;
– la diffusion non consentie avec une intention méchante ou dans un but lucratif de contenus à caractère sexuel est punie de la réclusion de dix ans à quinze ans et d’une amende de deux cents euros à dix mille euros ;
– le viol est puni de la réclusion de quinze ans à vingt ans.
Exploitation sexuelle des mineurs
Une avancée de la réforme de 2022 consiste dans le fait que le législateur regroupe dans une seule et même section l’ensemble des dispositions relatives à l’exploitation sexuelle des mineurs.
Cette nouvelle section regroupe dorénavant les comportements infractionnels suivants :
- L’approche de mineurs à des fins sexuelles ;
- La débauche de mineurs et la prostitution enfantine ;
- Les images d’abus sexuels de mineurs (pédopornographie).
A. L’approche de mineurs à des fins sexuelles
Art. 417/24 : L’approche d’un mineur à des fins sexuelles.
– « l’approche d’un mineur à des fins sexuelles consiste à proposer, par quelque moyen que ce soit, une rencontre à un mineur dans l’intention de commettre une infraction visée au présent chapitre, si cette proposition a été suivie d’actes matériels pouvant conduire à la dite rencontre. »
– « Cette infraction est punie d’un emprisonnement de trois ans à 5ans »
B. La débauche de mineurs et la prostitution enfantine
Articles 417/25 à 417/42.
Ces articles traitent :
- de l’incitation d’un mineur à la débauche ou la prostitution
- du recrutement d’un mineur à des fins de débauche ou de prostitution,
- de la tenue d’une maison de débauche ou de prostitution où un mineur se livre à la débauche ou à la prostitution,
- de la mise à disposition d’un local à un mineur à des fins de débauche ou de prostitution,
- de l’exploitation de la débauche ou de la prostitution d’un mineur,
- de l’obtention de la débauche ou de la prostitution d’un mineur (pénalisation du client),
- de l’organisation de la débauche ou de la prostitution d’un mineur en association,
- du fait d’assister à la débauche ou à la prostitution d’un mineur,
- de la publicité pour la débauche et la prostitution d’un mineur,
- de l’incitation à la débauche ou à l’exploitation de la prostitution d’un mineur en public ou par un moyen quelconque de publicité,
- de la confiscation de l’instrument de l’infraction.
C. Les images d’abus sexuels de mineurs
Art. 417/43 : « La définition d’images d’abus sexuels de mineurs »
On entend par images d’abus sexuels de mineurs :
- tout matériel représentant de manière visuelle, par quelque moyen que ce soit, un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite, réel ou simulé, ou représentant les organes sexuels d’un mineur à des fins principalement sexuelles ;
- tout matériel représentant de manière visuelle, par quelque moyen que ce soit, une personne qui paraît être un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite, réel ou simulé, ou représentant les organes sexuels de cette personne, à des fins principalement sexuelles ;
- des images réalistes représentant un mineur qui n’existe pas, se livrant à un comportement sexuellement explicite, ou représentant les organes sexuels de ce mineur à des fins principalement sexuelles. ».
Porter plainte
La prescription est un concept général de droit qui désigne la durée au-delà de laquelle une action en justice n’est plus recevable. Cela signifie qu’une victime dispose d’un certain délai pour porter plainte.
Depuis le 30 décembre 2019, lorsqu’une infraction sexuelle grave a été commise sur une personne mineure, ces infractions sont imprescriptibles : les auteurs de telles infractions pourront être poursuivis à tout moment.
Les délais de prescription restent d’application pour les infractions commises à l’encontre des personnes majeures. Pour le viol, le délai de prescription est de 10 ans à dater de la commission de l’infraction, 15 ans si la victime est décédée.
Contacts utiles
Si tu es victime ou témoin de violences sexuelles, n’hésite pas à demander de l’aide. Voici quelques contacts
- Centres de planning familial : la liste des centres de planning familial agréés en Wallonie et à Bruxelles
- Child Focus : 116 000. Child Focus est compétent en cas d’abus sexuel, d’exploitation sexuelle, de revenge porn…
- Maintenant j’en parle : tchat d’aide aux victimes d’abus sexuel
- La ligne téléphonique Ecoute-Enfant : 103 (24 heures sur 24). Numéro d’appel gratuit à destination des jeunes pour parler, pour être écouté, dans l’anonymat
- Centre de prise en charge des victimes de violences sexuelles : offre des soins multidisciplinaires aux victimes de violences sexuelles et des conseils aux personnes de soutien
- SOS Viol : accompagnement dans les démarches médicales, sociales, psychologiques
Voir aussi :
MAJ 2024